Beaucoup d’entre nous pensent que la société est de plus en plus violente, alors que nous n’avons jamais été autant en sécurité. Ainsi, les pays européens connaissent une baisse quasi régulière du taux d’homicide depuis le Moyen-Âge [1]. Par exemple, le taux d’homicides perpétrés par des hommes à Londres a chuté de 98% entre 1300 et 1909 !
Après une remontée de la violence entre 1960 et 1990, il y a une chute très importante de la violence depuis 1990, qui a été qualifiée de « plus important phénomène criminologique de l’époque moderne. » [2] Le fait a d’abord été repéré aux États-Unis, en particulier à New York et a été largement médiatisé dans les années 1990. Ainsi, la violence dans ce pays a diminué de 70% entre 1993 et 2011 [3]. Mais diverses recherches ont ensuite montré que c’est un phénomène largement répandu, en particulier dans les pays développés, que ce soit en Europe de l’Ouest et de l’Est, en Amérique du Nord, en Océanie et dans les pays riches d’Asie [4].
Une étude menée en France par le criminologue Jean-Luc Besson montre qu’en vingt ans, de 1994 à 2013, le taux d’homicide volontaire constaté par l’Institut médico-légal de Paris a baissé de 65%, passant de 256 cas à 90 ! [5] Chez les hommes, traditionnellement deux fois plus souvent victimes que les femmes, cette baisse a même atteint 70%, tandis que chez les femmes, la diminution a été de moitié. Notons au passage que la part des morts violentes dans le total des décès est très inférieur en France à ce que l’on observe à l’échelle mondiale (moins de 10 fois moins : 0,07 % contre 1 %).
Pourquoi alors, croyons-nous souvent que la violence augmente ? Ceci est très probablement dû aux médias. Deux publications successives de l’Institut national de l’audiovisuel montrent que les crimes et faits divers occupent de plus en plus de place dans les journaux télévisés, donnant une perception biaisée de la réalité.
[1] Pinker S. (2012). The better angels of our nature: a history of violence and humanity. Londres, Penguin books. Muchembled, R. (2008). Une histoire de la violence, de la fin du Moyen Âge à nos jours, Paris, Points Seuil. Spierenburg, P. (2008) A history of murder: Personal violence in Europe from the Middle Ages to the present, Cambridge, Polity. Eisner, M. (2003). Long-term historical trends in violent crime. Crime and Justice: A Review of Research, 30, 83-142.
[2] Farrell, G., Tilley, N. & Tseloni, A. (2014). Why the crime drop?, Crime and justice: A review of research, 43, 421-490 (p. 421).
[3] Truman, J. L., & Planty, M. (2012). Criminal victimization, 2011. Washington, US Department of Justice. ???
[4] Eisner, M., Nivette, A., Murray, A. L. & Krisch, M. (2016). Achieving population-level violence declines: implications of the international crime drop for prevention programming, Journal of public health policy, 37, Supplement 1, 66-80.[5] Besson, J.-L. (2015). Les homicides volontaires diagnostiqués par l’Institut médico-légal de Paris de 1994 à 2013, Focus, 9, 1-44. Voir aussi les recherches de Laurent Mucchielli : Mucchielli, L. (2011). L’invention de la violence. Des peurs, des chiffres, des faits, Paris, Fayard. Mucchielli, L. (2008). Une société plus violente ? Une analyse socio-historique des violences interpersonnelles en France, des années 1970 à nos jours, Déviance et Société, 32 (2), 115-147.